Mal d'amour
Hier soir, très tard, alors qu'il est dans la cuisine (il adore faire la vaisselle), mon amoureux m'appelle. Je quitte donc mon lit et le Docteur House qui j'en suis sûre, se languit de me voir revenir, pour aller voir ce qui se passe en cuisine. Et là, horreur, je découvre que Fiston Premier a dessiné, au stylo en plus, sur le comptoir en pin massif ... en soi, c'est déjà abberrant qu'il se soit permis une chose pareille: il va sur ses 7 ans quand même, ce n'est plus un bébé! Mais le pire du pire, c'est de réaliser qu'il ne s'agit pas d'un simple gribouillage, il a écrit quelque chose. Maladroitement parce que j'ai du mal à déchiffrer. Mais quand j'y arrrive, j'ai le coeur qui s'arrête de battre.
MAMAN JE NE T EMME PAS
Comment on survit à ça?! Pourtant, j'en ai déjà bavé avec lui... ce n'est pas la première fois que je subis son chantage affectif. Et certainement pas la dernière. Je ne devrais donc pas le prendre si mal mais sur le coup, je suis juste anéantie, anesthésiée... je n'écoute même plus ce que me dit mon chéri, j'entends bien des "faut pas laisser passer ça" et d'autres du même genre mais je suis ailleurs. Dans un monde où mon fils adoré, la chair (fraîche) de ma chair (molle), ne m'aime pas. Tellement pas qu'il a besoin de l'écrire, de le graver même, dans le bois. Comme un serment d'amour à l'envers... je retourne me coucher. Me cacher sous la couette. J'ai envie de pleurer mais je suis incapable de manifester la moindre émotion. Mon cher et tendre me rejoint, il me parle mais je suis déconnectée. Il comprend alors que ça m'a profondément affectée. Il tente de me toucher l'épaule pour m'apaiser mais je le repousse. Brusquement et méchamment. Il le prend mal forcément et va fumer une cigarette dehors... sa quatrième de la journée alors qu'il ne s'en permet que trois désormais. Je m'en veux de ça aussi. Je ne suis ni une bonne mère, ni une gentille amoureuse. Et j'ai le toupet d'être malheureuse en plus!
Plus tard quand il m'aura rejoint, et qu'il m'aura pardonné (encore une fois!), nous discuterons longtemps de ce message de désamour. Qui j'en suis sûre, est en réalité tout le contraire. Ce matin, quand mon homme lui a demandé de s'expliquer , mon fils a raconté qu'il avait écrit ça sous le coup de la colère, quand je l'ai envoyé dans sa chambre parce qu'il m'avait coupé la parole pour la seconde fois en 2 minutes. A sa décharge, je l'avais aussi envoyé dans sa chambre une heure plus tôt parce que j'étais au téléphone et que je ne souhaitais pas qu'il entende ma conversation. La vie est bien injuste pour les petits garçons d'aujourd'hui... Il est donc venu s'excuser près de moi ce matin mais comme je dormais encore, je lui ai vaguementr répondu qu'on en reparlerait à son retour de l'école.
Mais je ne me fâcherai pas. J'ai compris qu'il avait besoin d'encore plus d'attentions. Malgré mes efforts pour ne pas l'écarter sous prétexte que son petit frère m'accapare trop, je dois lui accorder davantage de temps. Des moments où je ne suis qu'à lui. Et où je ne me laisse pas aller à mes propres préoccupations parce qu'il sent intuitivement quand je ne suis pas vraiment là. Ce n'est pas évident pour moi parce que je n'ai jamais fait d'efforts jusque là, ni avec mes enfants ni avec personne d'ailleurs. Quand je suis bien, tant mieux pour tout le monde parce que je donne beaucoup et avec plaisir mais quand je broie du noir ou que je suis juste ailleurs, je me contente de faire le stric nécessaire. Je ne suis là pour personne. Il y a de grandes chances pour que ça finisse par se retourner contre moi. Quand on a une famille, des gens qui nous aiment, on ne peut pas se permettre d'agir ainsi. D'autant que je suis la première à ne pas supporter que mon amoureux me fasse payer sa mauvaise humeur... et j'ai la mauvaise foi de penser qu'il devrait supporter mes sautes d'humeur à moi? Sous quel prétexte?
Evidemment, je ne viens pas subitement de découvrir cette réalité mais les mots de mon fils, à jamais gravés sur le comptoir de la cuisine m'ont fait admettre qu'il était temps que je ne me repose plus sur l'amour inconditionnel qu'il est censé me porter. Bien sûr qu'il m'aimera toujours, c'est viscéral l'amour que l'on porte à sa mère mais en grandissant, quand il aura acquis un sens critique, je veux qu'il puisse se dire qu'il m'aime aussi parce que je suis une super chouette maman.